La jeune femme qui avait accueilli Naga à l'entrée du bâtiment avait considéré le sourire crispé de celui-ci comme une marque de nervosité et avait entrepris de le détendre en lui glissant d'un ton enjoué ses conseils personnels pour s'adresser à un public handicapé. Ses joues rosées gagnaient en intensité à mesure qu'elle s'exprimait ; elle semblait maladroite et essoufflée alors qu'elle lui délivrait sur le seuil de la porte son tout dernier conseil, prête à le retenir encore un peu pour l'aider davantage, mais consciente de devoir le laisser s'envoler.
Le silence régna, en dehors des bruits de chaises qu'ils soulevaient pour former un cercle étroit où chacun pourrait repérer chaque personne en train de s'exprimer, des bouteilles d'eau, que Naga aligna avec méticulosité sur un table sur le côté, du balai, que la jeune femme passait sans grand talent pour éliminer les dernières poussières.
C'était la partie facile.
Le reste ne l'était pas.
La jeune femme aidait certains d'entre eux à entrer : ils appréciaient retrouver le bras solide de la bénévole qui les guidait vers leur siège en faisant traîner son sillage de parfum. D'autres, plus autonomes peut-être, marchaient avec leur canne avec une assurance qui impressionnait Naga. Il se demandait bien ce qu'il allait pouvoir leur rapporter.
Il n"avait pas osé bouger, par crainte des ravages qu'aurait causé son propre caractère, mais la présence de ce chien blanc et heureux de vivre attira son regard comme une tache de banquise dans la grisaille de Pallatine. Sans y réfléchir, il s'avança pour le caresser. Il se retint au dernier instant et tourna son regard vers sa propriétaire.
« Il est magnifique. Comment est-ce qu'il s'appelle ? »