ALASKA JOANNE CASTILLO

Caractère

ELLE FAIT PENSER À UNE POUPÉE DE PORCELAINE AVEC UN CŒUR MAL COUSU ET DE GRANDS YEUX VERTS FORÊTS – AUSSI SAUVAGES QU'ELLE.

Alaska la peau blanche – presque lunaire, le poids plume, un brin de beauté, le piercing au nez qui lui est dans les nuages, méli-mélo d’un somptueux regard ourlé de cils interminables, ses cheveux noirs – avec des mèches venant caresser ses joues rose pêche – abîmés à force de trop jouer avec dans les sales moments à encaisser. Alaska et ses yeux verts ses yeux d'oiseau de proie si clairs qu'ils paraîtraient presque blancs – transparents. Elle n'a jamais beaucoup parlé, Alaska. On raconte que même quand elle est née, elle n'a pas crié. Alaska essaye d’inspirer d’expirer mais surtout de s’extirper de ses pensées si pourpres si sombres ; elle inspire elle expire et putain elle conspire contre le monde contre l’humanité et toutes ces grosses merdes tous ces débiles détraqués saccagés qui croient qu’ils ont tout compris qu’il suffit d’aligner des belles-lettres pour valoir la peine d’être écouté et et et et,

Et ces monstres de titane. T’es une sale gamine une sale petite conne, bordel. Alaska c’est cette putain d’enfant, cette sale môme qui croit qu'elle peut survivre en disant à tout le monde d'aller se faire foutre, qu'elle n'est pas assez bien même quand elle fait de son mieux puis qu’elle n’est pas assez belle puis pas assez mignonne qu’elle n’est juste pas assez putain pas assez comme il faut. Alaska ça a toujours été cette gamine qui joue ses émotions à pile ou face et qui perd contre elle-même à chaque fois.

Alaska c’est cette lâche qui pleure, qui couine parce que son âme est tellement détruite et qu’elle a envie de cogner son crâne contre le sol en criant comme une malade ou de se tirer une balle, de se tailler les veines ou prendre deux trois cachets de trop mais c’est toujours le mauvais moment pour qu’elle crie, qu’elle hurle, qu’elle fasse une crise parce que pour Alaska on n’a jamais le temps, parce qu'Alaska on ne veut pas la voir pleurer et que putain si elle venait à partir, qu’est-ce qu’on ferait sans elle, qu’est-ce qu’on ferait. Alaska et une dizaine de nuances de violet sous ses yeux, le sommeil la surprenait souvent trop tôt avant qu’elle ne puisse dérouler totalement la bobine de ses souvenirs. Alaska était atteinte d’une mélancolie dont elle ne connaissait même pas l’origine. Elle était morte de chagrin. Alaska n’était pas une méchante fille vous savez, elle voulait seulement exister.

Alaska elle angoisse pour un rien jusqu'à en avoir mal au ventre et envie de vomir: elle est le genre de fille qui sourit aux inconnus mais qui n’ose pas poser de questions à ceux qui l’entourent, elle est le genre de fille à passer des nuits sans dormir et des journées sans rire, elle est le genre de fille à râler tout le temps, se plaindre tout le temps, le genre de fille qui hait pour un rien, chiale pour un rien, panique pour un rien, et qui change d'avis sur tout, n'importe quoi et n'importe quand. On est là à essayer de retrouver sa voix, ses mots, essayer de s'imaginer son visage, son sourire, ses lèvres plissées – parsemées de rouge à lèvres marron, son odeur de lait à la fraise parce que c’était son parfum préféré, son teint pâle, ses bras maigres, sa peau, les bretelles de son soutien-gorge glissant le long de ses épaules, ses poils qui se hérissent quand on complimente son regard cosmique.
Toi toi toi on essaye de te retrouver toi quand t’étais encore une petite fille Alaska,
et on ne te retrouve pas.
Alaska c’est la douceur des mauvaises nuits. Alaska c’est le joli côté des idées pourpres et sombres.
Alaska c’est juste le genre de fille à ne pas être leur genre de fille.