you don't know the half of the abuse

Il y a des lumières blanches braquées sur elle.
Il y a des bruits de moteur doux des murs blancs et le blanc est une couleur qui rend fou -elle le sait.
Il y a des bruits d'hommes des voix fatiguées des stylos qui grattent des feuilles et les stylos sont fait pour écrire les moindres erreurs -elle le sait.
Il y a des lumières blanches braquées sur elle.
des lampes qui se secouent au rythme de leurs courses qui s'effondrent quand ils trébuchent qui s'éteignent quand ils explosent
Il y a toujours des lumières blanches braquées sur elle, mais elle a appris il y a longtemps que se débattre ne servait à rien alors elle attend elle attend elle attend, elle fixe le plafond et elle prie pour qu'on ne vienne pas la voir.
Elle ne veut pas d'une autre cicatrice.
une cicatrice qui appelle sa jumelle, plantée sur sa peau comme un drapeau
Il y a des lumières blanches même quand elle ferme les yeux, même quand on lui donne des ordres mais oh elle obéit elle obéit -elle en a déjà vu trop se faire punir.
Il n'y a pas de fenêtres et elle n'est pas sûre que c'est la nuit mais elle le sent, elle a l'habitude -il y a une variation de pression un pourcentage d'humidité qui augmente et elle se rappelle avoir tout programmé si jamais elle se faisait capturer.
parce qu'elle ne veut pas rester
elle ne peut pas rester
Il n'y a pas de fenêtres mais on lui offre le luxe de vêtements et c'est déjà bien assez, sans que ça ne lui suffise.
Il y a une commode, rien d'assez haut pour elle ; ça ne l'empêche pas d'essayer de mal tomber.
de se briser la nuque en attendant de tout faire exploser
Il y a des caméras, elle les a vu mais elle ne leur sourit pas.
Ils savent qu'ils ont gagné.
Il y a des caméras, il y a des gardes qui viennent pour la récupérer l'immobiliser.
elle aurait dû mieux tenter
Il y a des jours qui passent, alors qu'elle trépasse au fond de sa carcasse.
Il y a les autres qui changent de visages et elle regarde, elle regarde et elle se terre dans un coin quand on fait mine de venir la chercher.
Il y a les autres mais elle a l'impression que ce ne sont que des fantômes.
elle n'arrive plus à parler, c'est comme si on lui avait coupé les cordes vocales comme si elles s'étaient décharnées et oh vous comprenez, il fallait qu'elle enlève la lame de sa gorge
alors elle rejette des repas qu'elle a peine à manger
alors elle rejette de son corps tout ce qu'ils peuvent bien lui donner
Il y a des jours qui passent et d'autres qui refusent.
Il y a des silences qui sont vrais et d'autres qu'elle se créer.
elle avait des poumons qui crachaient du sang et des mains qui tremblaient trop souvent ; elle voyait des explosions des villes décharnées arrachées ensanglantées aux veines retournées; rien ne poussait sur les déserts de métal, et même ailleurs, tout était sale sale sale sale -ces mousses couleur jade et ces arbres qui pleurent leur sève et ces insectes partout partout et ces cerfs à double têtes ; leurs regards vides et juges juges juges juges.
Il y a des choses omniprésentes et d'autres qu'elle oublie.
Il y a le temps qui passe mais jamais la peur ne trépasse.
la lune pleurait, elle déversait des torrents -quelque chose de sauvage, d'immuable, et tous étaient pris d'une nostalgie quand ils croisaient sa vue oh la lune n'était plus -on disait qu'elle allait tomber, un jour, comme les océans qu'elle déversait, tout comme on disait avant qu'elle était faite de cailloux et de magma.
on a appris une chose de la fracture de la Lune : les Hommes ont tord.
Il y a des murs parfois blancs parfois trempés dans d'autres sangs.
Il y a des gens et parfois satan.
elle revoit des sourires au creux des joues, des chaleurs bien différentes de celles du soleil, de celles qui faisaient fondre la peau comme de la cire de bougie
elle revoit des pendus des corps sur lesquels on marchait parce que l'on avait pas le choix
Il y a une tête familière, de l'autre côté de sa cellule.
Il y a ses jolis cheveux bruns, à moitié arrachés à moitié brûlés.
elle ne se rappelle pas du bunker elle ne se rappelle pas de ses parents elle ne se rappelle de rien et elle oublie même hier
elle n'a pas de ces photos étranges des moments capturés sur papier glacé elle n'a rien qui appartient aux temps anciens
Il y a ses traits fins et ces yeux plein de mépris de regrets et de colère.
Il y a du silence et beaucoup de choses que l'on cache.
elle ne voulait pas tu sais, elle ne voulait pas et elle aurait pu tout faire mais elle ne savait pas et quand on ne sait pas on fait des choses stupides mais quand on est en colère quand on croit ce qu'on nous raconte quand plus rien n'étonne et quand on pense qu'encore qu'encore on nous trahit
Il n'y a plus grand chose qui reste.
Il n'y a qu'une face, ou peut-être une double ; celle d'avant et celle d'après.
elle se demande si elle a encore le droit de respirer
elle sait que non mais ça ne l'a jamais empêcher d'inspirer
Il n'y a plus qu'un visage.
Il n'y a plus de résistance, déjà.
elle a beaucoup oublié mais elle se rappelle quand vous courriez vers l'est et qu'ils étaient à vous trousse quand ces sangles leur déformaient la bouche mais
Il y a du silence.
même quand ils courent c'est comme si on leur enlevait leur capacité à montrer qu'ils sont là
encore vivant, encore vibrant
Il y a des tests et elle se tait.
Il y a du silence.
et leur muselière comme une interdiction comme des chiens comme des cadavres à qui on ferme la gueule pour être sûrs qu'ils n'empeste pas trop de suite
Il n'y a pas de chiens, ici.
Il n'y a qu'un loup.
il n'y a pas d'explosion non plus et pourtant elle les a toutes parfaitement réglées elle en est sûre elle en est certaine et elle
elle croit que c'est peut-être mieux ainsi
Il y a une femme qui lui explique des choses.
Il y a une femme et elle a les yeux clairs comme un de ces lupins mythiques, il y a une femme et elle a les cheveux aux reflets de feu.
Il y a une femme mais il n'y a pas de réponse quand elle parle.
emprisonnée, elle peut payer
emprisonnée, elle peut se méfier
Il y a des nouveaux endroits des quartiers qu'elle ne connaît pas.
Il y a des nouvelles coutumes un nouveau langage des nouvelles horloges et d'autres virus, il y a des nouvelles têtes des nouveaux sourires des nouveaux lieux et d'autres vêtements, il y a des arbres hauts perchés sans pendus accrochés des nouvelles caméras des nouvelles règles et la froide sensation d'être surveillé.
Il y a la tentation mais l'impossibilité.
elle se rappelle de la première fois -comme ils ont tenté de lui laver le cerveau de lui faire sortir les tripes comme il lui demandait maintes et maintes fois, le sourire sur les joues oh et puis comment ils sont passés au tison aux scorpions au poison
Il y a des gens qui tentent de lui faire croire des choses.
Mais elle ne fléchira pas.
en mémoire de toi