Ven 5 Mai 2017 - 1:38
shooting stars |
Tu as mangé une poignée de céréales ce matin. Une plus petite poignée que d'habitude, parce qu'il ne restait plus de tes céréales à toi - tu blâmes Hayden, tu te souviens très bien qu'il te restait le fond de la boîte mais quand tu as ouvert le placard, aucune trace - et tu as dû manger ses monstruosités sucrées à elle et tu as déjà l'impression que le sucre te colle à la peau. D'ailleurs, tu t'es pesée en te levant, et tu as pris un demi kilogramme. Tu as passé dix minutes devant le miroir à vérifier compulsivement que ça ne paraît pas, que tes joues n'ont pas gonflé, que ton ventre est resté plat, que personne ne pouvait possiblement s'en rendre compte. Tu t'es répété ça, que personne ne pourra le voir, le remarquer, au moins cinq mille fois depuis, et pourtant il y a quelque chose en toi qui n'est pas sûre. Tu sais bien que tu es la seule qui remarque ça, parce que tu sais que tu ne le remarque pas sur les autres, mais toi c'est différent. Tes standards sont plus hauts. On remarque facilement la différence entre la perfection (39 kg) et non (39,5 kg). Ah, tout du moins, toi tu le remarques (sur toi).
Tu as un peu envie d'annuler tous tes plans et de rester chez toi. De travailler sur quelques vidéos, de jouer à quelque chose et de devenir la toi de devant la caméra, qui ne se soucie de rien et qui fait face à ses problèmes le sourire au lèvres. Faire semblant que tes seuls problèmes sont nichés entre deux lignes de programmation, réglés d'un coup de joystick un peu plus précis. Tu n'as plus la précision que tu avais, avec tes doigts de squelette, mais ce n'est pas grave. Ce n'est pas comme qui que ce soit s'en rendait compte. Ils pensent qu'ils te connaissent, qu'ils connaissent ta vie (tu les trimballes toujours dans ta poche, après tout), et pourtant ils ne savent que ce qui tu veux bien leur montrer. Mais c'est un peu ton métier, de leur faire croire qu'ils sont tes amis. C'est la différence entre ce qu'il y a à la télévision, et c'est ce qui fait(sait) de Youtube une plateforme si populaire: la familiarité que les gens célèbres ont bien vite appris à établir entre eux et leur audience. Les gens ne veulent pas de quelqu'un d'autre d’inaccessible dans leur vie; ils veulent se sentir comme s'ils n'étaient pas seuls.
Tu as appris à prendre avantage de cela, d'une certaine façon. Ce n'est pas comme si tu en tirais quelconque remords, de toute façon. Même à Pallatine, c'est la même chose. Et les douzaines d'histoires de gens qui t'ont rencontrés dans la vie et qui clament haut et fort que tu es, en réalité, une pétasse flamboyante ne font rien pour diminuer l'amour que ceux qui te suivent ont pour toi. Après tout, ils te connaissent: ils savent que tu ne peux pas être comme ça. Ceux qui se plaignent ne font qu'inventer des histoires. Leur naïveté te fait presque ricaner, alors que tu verrouilles la porte de ton appartement derrière toi. Tu as décidé de sortir, finalement. Rester enfermée ne peut pas être bon pour toi, et tu as promis à Sungmin de le rencontrer dans un petit café que vous fréquentez tous les deux, et il y a bien peu de choses qui pourraient t'empêcher de voir Sungmin.
Il est un peu ton pilier. C'est le seul à qui tu t'autorises de parler de tes problèmes (bien que tu n'en parle pas beaucoup. qu'y a-t-il à dire?), et le seul qui les connaît réellement. Explicitement. Tu n'as jamais dit le mot 'anorexie' (tu te refuses même à le penser), mais c'est tout comme. Tu lui fais totalement confiance, probablement aveuglement, et si jamais tu as un problème, si tu as besoin de parler, tu sais qu'il n'est qu'à deux clics sur ton téléphone. Et il sait aussi très bien que c'est la même chose pour toi. Honnêtement, si tu ne l'avais pas, tu ne sais pas trop ce que tu deviendrais. Oh, tu survivrais (tu as bien survécu à ton séjour à l'Institut, après tout), mais sans lui pour te supporter tu serais dans un bien pire état. C'est donc à ça, à lui, que tu penses alors que tu te diriges vers votre lieu de rendez-vous, la tête haute et les épaules fières, même si tout ce que tu as envie de faire c'est de t'arrêter et de t'amputer de ce demi-kilogramme qui te hante. Tu prendras un seul sucre dans ton café pour compenser, tu te dis.
Une clochette tinte alors que tu pousses la porte de l'établissement et t'y engouffres. Rapidement, tu fouilles l'endroit du regard, jusqu'à ce que tes pupilles se posent sur cette tête que tu connais, et que tu te dirige vers lui avec un sourire sincère reflété sur ton visage. ‟Hey, babe.” Quelque chose en toi se calme, maintenant qu'il est devant toi. Tu es contente de ne pas être restée chez toi. Tu déposes ton sac sur le banc à côté de lui, mais tu ne t’assois pas tout de suite. À ce que tu saches, vous commandez, puis vous partez. Tu as besoin de faire les magasins, de toute façon, avec le printemps qui grimpe à vos portes tu as besoin de renflouer ta garde-robe. ‟Ça va?” Tu veux savoir, même si tu n'as pas particulièrement envie qu'il te renvoie la question.
Tu as un peu envie d'annuler tous tes plans et de rester chez toi. De travailler sur quelques vidéos, de jouer à quelque chose et de devenir la toi de devant la caméra, qui ne se soucie de rien et qui fait face à ses problèmes le sourire au lèvres. Faire semblant que tes seuls problèmes sont nichés entre deux lignes de programmation, réglés d'un coup de joystick un peu plus précis. Tu n'as plus la précision que tu avais, avec tes doigts de squelette, mais ce n'est pas grave. Ce n'est pas comme qui que ce soit s'en rendait compte. Ils pensent qu'ils te connaissent, qu'ils connaissent ta vie (tu les trimballes toujours dans ta poche, après tout), et pourtant ils ne savent que ce qui tu veux bien leur montrer. Mais c'est un peu ton métier, de leur faire croire qu'ils sont tes amis. C'est la différence entre ce qu'il y a à la télévision, et c'est ce qui fait(sait) de Youtube une plateforme si populaire: la familiarité que les gens célèbres ont bien vite appris à établir entre eux et leur audience. Les gens ne veulent pas de quelqu'un d'autre d’inaccessible dans leur vie; ils veulent se sentir comme s'ils n'étaient pas seuls.
Tu as appris à prendre avantage de cela, d'une certaine façon. Ce n'est pas comme si tu en tirais quelconque remords, de toute façon. Même à Pallatine, c'est la même chose. Et les douzaines d'histoires de gens qui t'ont rencontrés dans la vie et qui clament haut et fort que tu es, en réalité, une pétasse flamboyante ne font rien pour diminuer l'amour que ceux qui te suivent ont pour toi. Après tout, ils te connaissent: ils savent que tu ne peux pas être comme ça. Ceux qui se plaignent ne font qu'inventer des histoires. Leur naïveté te fait presque ricaner, alors que tu verrouilles la porte de ton appartement derrière toi. Tu as décidé de sortir, finalement. Rester enfermée ne peut pas être bon pour toi, et tu as promis à Sungmin de le rencontrer dans un petit café que vous fréquentez tous les deux, et il y a bien peu de choses qui pourraient t'empêcher de voir Sungmin.
Il est un peu ton pilier. C'est le seul à qui tu t'autorises de parler de tes problèmes (bien que tu n'en parle pas beaucoup. qu'y a-t-il à dire?), et le seul qui les connaît réellement. Explicitement. Tu n'as jamais dit le mot 'anorexie' (tu te refuses même à le penser), mais c'est tout comme. Tu lui fais totalement confiance, probablement aveuglement, et si jamais tu as un problème, si tu as besoin de parler, tu sais qu'il n'est qu'à deux clics sur ton téléphone. Et il sait aussi très bien que c'est la même chose pour toi. Honnêtement, si tu ne l'avais pas, tu ne sais pas trop ce que tu deviendrais. Oh, tu survivrais (tu as bien survécu à ton séjour à l'Institut, après tout), mais sans lui pour te supporter tu serais dans un bien pire état. C'est donc à ça, à lui, que tu penses alors que tu te diriges vers votre lieu de rendez-vous, la tête haute et les épaules fières, même si tout ce que tu as envie de faire c'est de t'arrêter et de t'amputer de ce demi-kilogramme qui te hante. Tu prendras un seul sucre dans ton café pour compenser, tu te dis.
Une clochette tinte alors que tu pousses la porte de l'établissement et t'y engouffres. Rapidement, tu fouilles l'endroit du regard, jusqu'à ce que tes pupilles se posent sur cette tête que tu connais, et que tu te dirige vers lui avec un sourire sincère reflété sur ton visage. ‟Hey, babe.” Quelque chose en toi se calme, maintenant qu'il est devant toi. Tu es contente de ne pas être restée chez toi. Tu déposes ton sac sur le banc à côté de lui, mais tu ne t’assois pas tout de suite. À ce que tu saches, vous commandez, puis vous partez. Tu as besoin de faire les magasins, de toute façon, avec le printemps qui grimpe à vos portes tu as besoin de renflouer ta garde-robe. ‟Ça va?” Tu veux savoir, même si tu n'as pas particulièrement envie qu'il te renvoie la question.