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a cruel angel's thesis | Dimitri

Ven 3 Aoû 2018 - 6:26
тезис жестокого ангела

Tu ne te souviens pas vraiment des dernières semaines. Tout se perd, puisque tu as tout perdu. Tout n'est qu'un flou de douleur, de pensées auxquelles tu ne sais même plus assigner de sens, de la monotonie de ton travail et pourtant de ton assiduité, toujours. Tu as tout perdu, mais dans la coquille vide de tes os restent encore gravés ces actions que tu as posées tant de fois. Tu n'as plus rien à faire des apparences, et pourtant tu les conserve. Comme si dans le plus profond de ton crâne était gravé cet ordre, de ne jamais montrer à personne que tu souffres sauf ceux à qui tu veux faire le plus mal. Ceux que tu as échoué. Ceux qui méritent de monter immédiatement au paradis avant de même pouvoir te voir et être tachés plus noir que l'enfer par ta présence. Tu croyais avoir conservé une chose, une seule dans ta vie. Tu croyais n'être un échec que d'une seule, si monumentale façon. Il ne reste plus rien de toi. Tu ne désignerais pas tes regrets comme 'quelque chose'. Tu t'es fracassé, comme tu as fracassé tant de choses, en tellement de petits morceaux qu'on ne pourra jamais te réparer. Si tu le pouvais, tu ramperais plutôt que de marcher - tu ne mérites pas de t'approcher du ciel plus hautement qu'au ras du sol. Tu ne mérites pas de porter tes épaules. De soulever ta tête.

Tu conserves les apparences, parce qu'elles ne valent rien.
Ton appartement est rempli d'objet fracassés que tu as mal rapiécés. Juste pour tenir le désordre à distance. Juste pour conserver une illusion d'ordre. Tout a l'air normal, mais il suffit de doucement pousser la bibliothèque pour la voir s'écrouler. Il ne te reste que deux verres intacts. Tu as posé quelques livres sur ton bureau pour cacher les taches d'encre. Tu as renié les draps blanc, puisque tu n'arrives plus à les laver du sang de tes mains. En entrant, tout a l'air à sa place. Seul toi connaît l'état réel des choses. Personne ne doit savoir qu'il ne reste plus rien que toi, puisque tu dois souffrir en silence. Tes mots n'ont jamais que ruinés plus de choses encore.
Tu es à l'atelier lorsque ton téléphone sonne. Tu ne reconnais pas le numéro qui s'affiche, et t'apprêtes donc à le reposer. Puis, une pensée traverse ton crâne comme une balle, et tu réponds. La voix de l'autre côté fait trembler tes mains. Tu raccroches, poses tes outils, et sort de l'atelier à la course, sans penser à oublier de verrouiller la porte derrière toi. Tu cours jusqu'à ton appartement, tu cours et tu t'y jettes sans plus attendre - tu te changes et puis tu retournes à la cuisine t'asseoir à la table. Tu poses tes mains tremblantes sur la table, et tu attends.

Quand on sonne à la porte, tu t'élances sans avoir la présence d'esprit de conserver quelconque prestance. Tu ouvres, et dévoiles ton cadet devant toi.
Димитрий.
Tu as oublié de cacher la bouteille de vodka qui trône sur le comptoir de la cuisine. Tu en as encore les relents dans le fond de la gorge, couplés avec la nausée qui ne te quitte plus depuis un moment. Tu fais un pas de côté, pour inviter Димитрий à entrer là où personne ne peut deviner que tu es le pire des démons. Avec tes meubles abîmés à l'air pourtant parfaitement fonctionnels. Tu as quelque chose de coincé dans la gorge (une lame), alors tu attends que ton cadet se prononce en premier. De toute manière, tu n'as plus le droit de lui parler sans qu'il ne s'adresse à toi en premier.
Sam 11 Aoû 2018 - 19:32
Il détestait cette sensation de marcher en équilibre sur une corde trop étroite, et de tomber avant d'avoir pu avancer.
Ce qui le faisait vaciller, c'était cette rage nouvelle qui menaçait de le submerger à toute heure de la journée. Ce sentiment et son objet n'étaient en rien inédits, car toute la personnalité de Dimitri s'était construite sur l'admiration haineuse qu'il portait à son frère, mais ce parfum de trahison, qu'il n'avait encore jamais expérimenté, avait ébranlé tout cet édifice lentement bâti au cours des années. Qu'il eût été tué par son frère était une chose que Dimitri pouvait accepter. Le voir s'effondrer pour s'être adonné au pêché était en revanche la plus insupportable des pensées. Ses rêves en avaient sensiblement pâli : ce rouge carmin qui tâchait les peaux et les murs se diluait progressivement face à ce flot liquide, légèrement bleuté, qui s'écoulait des yeux de son frère, et dans ce torrent de larmes, Dimitri se voyait relégué au rang d'une image, d'une idole que son aîné adorait, parce qu'il l'avait brisée et savait ne pouvoir la réparer. Un fantôme sans consistance, qui n'avait d'autre usage que nourrir l'auto-apitoiement d'un malade aveuglé par son passé. Un simple souvenir, de circonstance, plus utile à détourner le regard qu'à se rappeler.

Dimitri voulait vivre.

Il n'avait que la rage pour le faire tenir : pour Dimitri, elle ne se limitait pas au rôle de béquille, de soutien, comme d'autres s'en servaient pour soumettre leurs faiblesses et trouver le courage de lutter contre la vie ; pour Dimitri, la rage était la vie, son essence même, si étroitement mêlées l'une à l'autre que si la rage disparaissait, son existence s'évanouirait à sa suite. Il se remettait doucement de cette erreur, de cette confiance trop grande qu'il avait prétendu porter à son frère, pour être payé de son plus grand mépris.
Alors, lui faire éclater sa rage en pleine face, pour le plaisir de vivre, valait ce coup de téléphone rapide et douloureux que Dimitri lui avait passé avant de se rendre chez lui. Il voulait être certain que son aîné se trouverait bien chez lui, pour l'offrir en cible à son ire en toute tranquillité. Effacer tout sentiment de sa voix, prétendre à une fausse neutralité était plus difficile qu'il ne l'avait imaginé : des morceaux de rage avaient sans doute filtré de ci, de là, mais qu'importe, Ilya avait répondu, quoique même cette docilité eût alimenté la colère du jeune homme. Il aurait préféré une résistance condescendante à cet accord où traînaient des relents de soumission.
Cette volonté de bien faire, de se rendre digne de son cadet transpire des gestes d'Ilya - un sourire dégoûté se dessine sur le visage de Dimitri, qui ne prend pas la peine de saluer, certain de son impunité. Sa rudesse chatouille ses derniers principes, son manque de politesse n'a jamais atteint de tels sommets. Deux attitudes contraires qui le mettent particulièrement mal à l'aise. Il n'a fallu qu'un coup d'œil à l'appartement pour comprendre le désastre qui s'y est produit. Tout est en ordre, assurément mieux rangé que la tanière de Dimitri - mais tout paraît si grossier, mal assorti, digne d'une ménagère moyenne, non d'un ancien soldat aussi finement calibré.Tout, dans cet appartement, le dérange, le somme de s'éloigner : d'un côté, le ravage qui se lit dans les objets, si proche de ce que Dimitri connaît, de l'autre, cette attente insupportable de son frère, cette volonté de se racheter si forte, qu'elle pourrait le pousser à toutes les indignités.

« Whoa... si j'avais pas vu ta gueule à l'entrée, j'aurais pas cru que c'était chez toi, ici. Qu'est-ce qui t'est arrivé pour que tu te laisses aller comme ça ? Ah oui, c'est vrai, j'oubliais, tu m'as tué, et bla bla bla, t'as plus le droit de ranger. »

Les conséquences de ses bravades laissent Dimitri complètement indifférent. Cela le rassurerait un peu de le voir enfin se redresser et lui coller la raclée qu'il mériterait. Parce qu'il ne ferme pas les yeux sur ce qu'il est, ce sale morveux qui profite de la situation pour jeter à son frère si mal aimé toutes les frustrations que son attention exigeante a éveillées en lui. Il sait qu'il se comporte mal. Mais il s'en moque désormais. Plus personne n'est là pour le lui rappeler.

+5
Ven 31 Aoû 2018 - 2:33
тезис жестокого ангела

Tu observes ton cadet, qui pénètre dans ton antre. Te connaît-il assez pour reconnaître cette grossière illusion d'ordre qui existe ici? Sans doute. Mais ton honneur est mort et tu ne peux trouver en toi le désir de ressentir quelque honte que ce soit de montrer à Димитрий l'état de ton chez toi - de ta psyché, brisée à ses pieds. Il sait déjà que tu t'es fracassé comme tu l'as fracassé lui-même, et s'il y a quiconque envers qui tu n'as plus rien à cacher, ton meurtrié, ton meurtrier est bien cet ange de la vérité. Il ne doit pas te voir comme ni grand ni droit, il doit voir ton squelette s'effriter et comprendre que tu ne vaux plus rien d'avoir tout échoué - qu'il ne doit plus jamais voir en toi quoi que ce soit à atteindre, qu'il ne doit plus lever les yeux pour te voir mais plutôt baisser la tête jusqu'aux enfers. Димитрий, Димитрий, que tu souffres de l'avoir brisé, taché, que plus jamais il ne vive avec un sourire au visage, que plus jamais il ne puisse connaître ce que tu aurais dû lui donner. Tu souffres, tu souffres avec tes lames dans la poitrine, tes côtes qui s'enfoncent dans tes poumons, tes tempêtes pour déchirer ton estomac, si bien qu'à le voir tu croirais oublier comment respirer - peut-être t'effondrer, ici, maintenant, et mourir sans pouvoir t'en empêcher. Mourir, et échouer à nouveau à faire ce qui doit être fait. Tu as du sang plein la bouche et des blessures qui couvrent tes mains, tes côtes qui s'ouvrent pour que tes viscères tombent à tes pieds. Un instant de cette douleur qui te submerge, qui te ferais plier le genou si encore tu ne conservais pas (sans le vouloir, sans le savoir) quelconque once d'orgueil. Comme une pointe dans ton crâne, une lobotomie inconsciente que tu ne peux pas voir.

Tu l'écoutes et tu connais comme une réaction ancrée dans tes os ton indignation face à ses mots, et pourtant jamais elle ne vient. Tu déglutis autour de la lame dans ta gorge, la douleur qui te traverse comme une balle et le rien qui ne reste de toi. Peut-être veut-il que tu te défendes. Peut-être cherche-t-il une réaction de ta part. Et pourtant tu restes aveuglé par tout ce que tu détruis, à te tenir debout devant lui sans la tour que tu as toujours tenté d'être, plutôt comme les débris au sol dans la poussière. Le moment t'es insupportable. Si est-il un instant où tu as considéré mourir le plus vite possible, c'est celui-ci. Avec Димитрий devant toi et sa rage au bout des canines, pendant que tu ne sais quoi répondre. Sans que tu ne puisses même tenter de réparer tout ce que tu as brisé, sans que tu ne puisses même te soulever au rang de martyr, sans que tu ne puisses le secouer et lui dire d'aller ailleurs - de t'oublier, de te laisser suppurer dans tes échecs jusqu'à ce que le poison aie don de ton souffle. Tu veux qu'il parte, et pourtant tu ne peux pas non plus concevoir qu'il tourne les talons à cet instant. Dans la dichotomie tu t'effondres, tu brises tes dents contre ta mâchoire et bande tes muscles pour les déchirer, que tu meures ici maintenant à cet instant pour ne pas vivre tes côtes qui menacent de se fracasser.
Что ты хочешь от меня, приехав сюда? (Que voulais-tu de moi en venant ici?)
Tu te réfugies dans tout ce que tu pourrais possiblement lui donner (c'est-à-dire rien), dans tout ce qui pourrait te donner la si vague illusion de pouvoir te faire encore quoi que ce soit qui lui est utile d'une façon ou d'une autre. Il est trop tard, beaucoup trop tard, et bien sûr tu ne peux plus rien lui donner, mais tu retourneras ciel et terre pour faire semblant que tu as encore le droit de te tenir devant Димитрий.


+5
Ven 31 Aoû 2018 - 10:35
Tout se résume à un sourire, un sourire vulgaire, mordu dans ses chairs décadentes, qui lui traverse le visage comme une plaie joyeusement suppurante. Ce n'est pas un sourire cajoleur, destiné à consoler : c'est une agression consciente, corrosive, destinée à saper les dernières résistances d'Ilya Kovalevski et finalement le détruire. Dimitri profite tant qu'il le peut de ce sentiment d'impunité qui le prive de la menace de se faire châtier à son tour, en regrettant ces temps heureux où la peur se faisait la compagne de leurs conversations. Il perçoit la frustration que son comportement provoque chez son frère, mais cette sage indifférence qu'il lui oppose, pour des motifs obscurs que Dimitri ne peut que deviner, le prive de la satisfaction d'avoir réussi à lui faire grincer les dents.
La raison de sa présence ici lui échappe aussi sûrement que les sentiments de son frère. Dimitri se doit de trouver un mensonge rapide qui couvrirait ses arrières, mais ce n'est pas facile, il n'est pas vraiment doué dans le domaine. Surtout qu'il se le répète, il n'attend rien de son aîné, il lui a prouvé qu'il ne lui servait plus à rien, qu'il n'a plus aucune utilité. C'est en raison de leur lien de parenté que Dimitri fait des efforts. Sans eux, il serait depuis longtemps parti, ravagé par une culpabilité qu'il attise, mais dont l'objet peut désormais être ignoré.

« Rien. » déclare-t-il en succombant à une forme d'honnêteté. « Je passais juste te voir, faire une visite de courtoisie, contempler la déchéance dans laquelle t'es tombé... » Une pause, légère, accompagne un coup d'œil appuyé sur le reste de la pièce. « Mais putain, je m'attendais pas à ça, ça fait combien de temps que tu vis pas ici ? On dirait que t'étais absent et que quelqu'un en a profité pour tout réorganiser. »

Le sentiment d'étrangeté qui émane de l'appartement le désole étrangement. La mise sous clés du passé est effective, définitive, il n'y a pas de retour en arrière possible. Dimitri préfère détourner le regard et se poser, accusateur, devant son frère :

« Eh bah alors, c'est comme ça qu'on accueille son invité ? Déjà que tu m'invites à peine à entrer, ensuite, tu ne me proposes pas à boire, ni une place sur ton canapé, je suis déçu, même moi, je fais mieux. »

Son ton accompagne ses paroles, de même que ses lèvres, qui se fanent à leur tour en une expression concernée. Pourtant, rien ne l'empêche de s'avancer et de repousser les limites de la familiarité jusqu'à ce qu'elles puissent l'englober.

+2
Lun 7 Jan 2019 - 4:09
тезис жестокого ангела

Contemples la déchéance dans laquelle ton péché t'as poussé. Contemples ces morceaux éparpillés, ces fantômes de ta psychée, ces cendres qui volent de ton bûcher pour aller tacher les innocents. Il ne reste plus rien de toi et tu te fais acteur de ton passé, comédien au rictus brisé qui tente d'imiter ce que tu as toujours été - ce que tu as toujours clâmer être, ce que tu as toujours construit sur des bases effritées dès le départ. Il ne reste plus rien de toi que les apparences dont tu ne sais pas te départir, celles qui ne montrent rien, ne valent rien et que tu ne préserves avec aucune assiduité, aucune précision de toute manière. Il ne reste plus rien de toi et même les yeux aveugles de ton meurtrié pourfendent le rideau déchiré de ton mensonge de l'autre côté des enfers, de la lame dans ta gorge, du verre dans tes mains et de la mort dans tes viscères. Tu t'ouvres et tu t'épanches devant lui avec ton sang vomi aux pieds de tout ce qu'il aurait dû être, tout ce que tu aurais dû construire, tout ce que tu as pu rêver d'être alors même que tu croyais toujours en tes ailes tachées et aux chaînes qu'il y avait posé. Tu n'as jamais possédé d'un ange que cet instant de regret profond le temps d'un clignement de paupière avant qu'il ne tombe.
Tu écoutes Димитрий dans ce moment insupportable, avec tes yeux vitreux et la fièvre du suicidaire pour embrûmer tes neurones. Tu ne peux que retenir tes mains de t'égorger, de fracasser la bouteille que tu vois au coin de ta périphérie et t'en pourfendre pour enfin pouvoir te vider de ton sang devant les yeux de ton cadet, qu'il puisse te voir mourir ici pour remplacer le souvenir de t'avoir assassiné lui même. Tu ne mérites pas la mort et pourtant tu la souhaites ici, pour t'échapper de son regard. Pour qu'il n'aie à subir ni ta présence ni tes péchés ni ta noirceur ni ta mort (pour que tu sois enfin libéré de la douleur qui te détruis et te dévores et tords tous les derniers lambeaux de tout ce que tu aurais dû être et de tout ce que tu aies jamais souhaité), qu'il se fasse enfin le martyr que tu méprises tant et qu'il ne soit plus taché de ton sang dans ses veines.

Tu t'étouffes en silence, tes mots coincés dans la gorge par un sanglot véhément que tu tente d'avaler pour le détruire. Tes épaules sont traversées d'un soubresaut, tes muscles bandés qui refusent encore de t'obéir, et tu ne sais trop si tu vas vomir ou pleurer.
Димитрий ne peut pas s'asseoir, puisque tu as défoncé le canapé et en a brisé une patte. Crochu comme tu l'es, tu ne lui permettra pas de s'abaisser à s'y poser.
Димитрий ne peut pas boire, puisque tu ne possèdes que de l'alcool pour épancher ta soif.
La honte t'écrases et t'écroules, si bien que tu crois un instant que tu vomiras, pleureras, et tomberas à genou tout à la fois devant lui. Avec tes côtes qui s'enfoncent dans tes poumons, tout ce qui t'étouffe et retiens dans ta trachée quelconque respiration complète - là où tu ne mérites pas de partager le même air que ton cadet. Qu'il doit puiser son souffle n'importe où tu n'es pas là, au bout du monde pour s'échapper de toi.
Мне нечего дать. (Je n'ai rien à donner.)
(que tu espères mourir ici, que Dieu lui-même descende pour te pourfendre sans savoir souffrir que tu ne taches son monde.) Tu mourras que Димитрий reste, et tu mourras qu'il s'en aille.
Прости меня. (Pardonne-moi.)
Tu t'en étouffes du bout d'un sanglot, de ce qui fait trembler ton tronc au complet, qui soubresaute tes épaules, qui tressaillit de tous tes muscles et de tous tes os qui se fracassent à cet instant.
Tu portes une main à ton visage pour remarquer les larmes qui tracent leurs sillons maudits le long de tes joues. Tes épaules tombent, ton thorax s'écroule, ta nuque se courbe et ton être tout entier s'effondre comme si Димитрий avait coupé les fils de ton pantin.
Прости меня. (Pardonne-moi.)
tu sanglotes. ça te déchire et te pourfend, fracasse tous les morceaux restants de toi, toute illusion de fierté ou d'orgueil sans que tu ne puisses même retenir les apparences entre tes doigts. elles coulent comme tes larmes, amères, profondes, de sanglots qui te démolissent et te térèbrent, avec un trou noir là où tu aurais il y a longtemps assumé qu'il y avait ton coeur.

Il ne devait pas te voir comme ça. Tu ne devais pas échouer. Et il y a tous tes regrets, tout ce qui aurait dû être qui t'échappe comme une rivière, comme un trésor au fond de la mer, comme les vagues, comme la pluie - et tu sais que tu devrais pleurer du sang puisque l'eau est trop pure, mais tu n'as même plus la force de t'en mépriser.
Прости меня. (Pardonne-moi.)
ça te déchires la gorge et t'éviscères la trachée - comme tu l'as assassiné, comme tu lui as imposé le fratricide alors que ses os ne devaient que servir le Bien et comme ses yeux devaient garder la pureté de la voie lactée.
Прости меня. (Pardonne-moi.)
avec ta voix brisée et tes traits tordus d'agonie, secoué de tressauts qui fracassent à la fois tous tes os et tous les espoirs que tu ne conservaient pas, toutes les vertues que tu as perdues, toute la droiture que tu n'as plus, et tous les morceaux écorchés de ton identité, ta voix, ton idéal et ton destin.


hrp: ça y est on l'a perdu
Dim 20 Jan 2019 - 23:16
Un nouveau rejet à essuyer. L'hospitalité la plus élémentaire, celle qui fait tenir les hommes entre eux et les empêchent de se frotter l'un à l'autre lui est une fois de plus refusée - et rien, dans l'attitude d'Ilya, ne suggère qu'un soupçon d'humanité vient lui faire regretter le dénuement dans lequel il se complaît. Le fantôme d'un uniforme bien brossé se surimpose à la figure squelettique du damné, comme si, après tout, rien n'avait changé.
Dimitri tique, agacé de cette austérité ironiquement restaurée, mais il s'abstient de commenter. Son envie de rester a déjà fondue, cependant, il doit insister. Pour une raison qui lui échappe un peu.
Et ces excuses répétées, susurrées comme une invocation pathétiques, ne l'aident pas à se concentrer. Dimitri devine les abîmes de douleur que chaque mot ainsi conjuré cache à l'intérieur de son aîné - mais il n'arrive pas à s'y intéresser. Il supporte, un peu, jusqu'à ce que soudain, il explose.

« Assez ! »

Sa voix résonne comme l'éclair, si forte et si puissante qu'elle ne peut que réduire son frère au silence. Tout, plutôt que supporter ses jérémiades insultantes - les siennes, au moins, avaient le bon goût de la variété.

« Ça suffit, Ilya, j'en ai assez de t'écouter. Alors ferme un peu ta gueule si tu veux pas que je te rebute à nouveau - ce que je regretterais. »

Dimitri fulmine en silence, incapable de trouver les mots justes pour exprimer cette colère métaphysique qui lui inspire des sentiments aussi violents envers son aîné. Il aimerait le comprendre, pour changer. Pour éviter d'exploser, Dimitri se dirige sans la moindre gêne vers la cuisine.

« T'embête pas, je vais nous faire du thé. » annonce-t-il en grognant.

Et quel contraste avec cette rage râpeuse qu'il vient de montrer ! Comme s'il s'était calmé ! Mais ce n'est que lassitude, qui mord dans ses chairs et détruit sa combativité.
Au lieu de cela, Dimitri ouvre en faisant claquer les portes les placards de la cuisine.
Mar 16 Avr 2019 - 3:03
тезис жестокого ангела

Si Dieu s'est déjà posé au fond de tes os, s'il a construit ton être à son image, s'il est ce que les chrétiens l'en vante - s'il est ce en quoi tu ne peux plus croire - ce en quoi tu dois croire pour avoir une once d'espoir en une quelconque justice- celle qui, au prix d'avoir laissé transpirer un péché ultime! au prix d'avoir pour toujours taché la terre de ton immonde! au prix d'avoir pour l'éternité démoli l'espoir d'une humanité aux fossés les plus profonds, les plus ignobles et pourtant toujours pardonnables! celle qui, à ce prix-là, te verras brûler au fond des enfers jusqu'à ce que les plus longs tréfonds de ton âme soient calcinés et méconnaissables - si cette justice est réelle, ancrée dans les os de l'univers; dans l'échafaudage de tout ce que l'Homme a pu daigner bon - la vertu, la miséricorde, la droiture, l'honnêteté - (tu ne peux en douter, sans quoi ta psychée brisée se fracassera sans que même le Créateur ne puisse plus jamais te reconnaître); si Dieu a construit un univers où cette justice-là te verras brûler, tu ne peux avoir été façonné à son image. Si Il reconnaît en son infini même l'ombre de ton âme, de ce qui te hante, de ce que tu as brisé sans jamais l'intention de le reconstruire - de tous tes échecs, les cendres de ton bûché, les bouts de tes chaînes, les os fracassés d'ailes que tu n'as jamais méritées - alors le divin n'est que l'ombre du malin, une copie brisée de ce qu'il était censé être. Puisque quoi que ce soit de bon ne peut porter quelque fragment de toi, que tu tacheras n'importe quelle perfection, n'importe quelle pureté de noir et de sang - de souillures qui ne pourraient jamais être absoutes.

Assez, le tonnerre tombe pour te foudroyer, et le silence te prends à la gorge - tu y poses des chaînes brûlantes avec la ferveur du pêcheur, comme si tu cherchais à être pardonné. Comme si tu pouvais souffrir qu'on t'adresse de mots sans haine, comme si tu méritais même quoi que ce soit sans venin, comme si tu pouvais te targuer de valoir de même voir l'illusion du soleil à travers tout ce qui aurait dû être brillant au fond de ton cadet. Les yeux fiévreux et les larmes qui tracent toujours leurs sillons exécrables le long de tes joues, qui brûlent ta peau comme de l'acide - comme l'eau bénite qui sans doute ferait fondre ta chair, qui te réduirait aux os crochus qui soutiennent toujours ton être maudit, misérable, qui ne devrait jamais se tenir debout. Les larmes sont trop pures, tu devrais pleurer du sang pour que ton visage soit taché comme tes mains, comme tout ce qui s'est si longtemps amassé sous tes ongles, comme la mort qui toujours, toujours, fait craquer chacun de tes os. Que l'on te pende des chaînes à ta gorge, que l'on laisse ton être damné balancer de l'échafaud et que tu ne puisses jamais avoir le droit à la mort libératrice, que tu souffres à suffoquer jusqu'à ce que l'univers s'écroule devant tes yeux. Tu ne peux pas mourir. Tu ne peux pas supporter le regard ni la présence de ton cadet, le denier que tu aurais dû tacher, le seul que tu aurais dû épargner, celui qui maintenant te menace d'un destin que tu ne saurais jamais lui faire souffrir et dont pourtant tu es si avide.

Il te tourne le dos et tu trébuches jusqu'à la bouteille de vodka laissée sur un comptoir - de doigts tremblant tu en retires le bouchon et en soulève une grande lampée jusqu'à ta gorge, qui coule derrière ta langue et brûle tout ce que tu ne dois plus conserver. Tu bois comme un avide, comme un assoiffé, comme un échoué un perdu un mort, seulement quand Димитрий te tourne le dos. Tu ne peux souffrir qu'il ne te voie, mais tu ne peux survivre sans te dévorer de l'intérieur et tu reposes la bouteille lourdement, avec un fracas que tu sais te trahis - et pourtant sans pouvoir t'en empêcher. Peut-être que s'il connaît la profondeur de ta déchéance, Димитрий aura le dégoût de partager ton air - peut-être qu'il s'en ira pour te laisser mourir, que tu ne puisses survivre qu'il te voie et pourtant que tu ne puisses survivre qu'il fasse le bon choix- qu'il s'enfuit sans ne plus jamais regarder en arrière.
Tu as eu tord de lui demander pardon. Jamais il ne devrait se tacher d'un tel péché, jamais il ne devrait même t'offrir une once d'indulgence ou de compréhension, puisqu'il ne doit jamais s'abaisser à être ainsi souillé. Tu lui as déjà volé tout ce qui aurait pu être bon, tu as déjà ruiné tout ce que tu as touché et tu ne peux souffrir qu'il soit davantage déshonoré, sans quoi tes os même s'effriteront, s'effondreront que tu pousses ton dernier souffle.
Tu as toujours les doigts crispés sur le goulot de la bouteille, les membres tremblants violemment que tu ne sais plus contrôler - tu ne sais plus rien contrôler, ni tes os ni tes muscles ni ta chair, et tu fracasses la bouteille sur le sol d'un geste trop brusque alors que tes doigts glissent et le fracas du verre contre le sol éclate la douleur dans ton crâne - le voilà l'instrument de ta mort, le verre cassé sur le sol, le côté tranchant d'un symptôme de ton péché, et tu tombes à genou pour aller agripper le verre entre tes doigts et réouvrir les lacérations le long de tes paumes.
Tu serres cette lame entre des doigts, ton sang s'épanche et de retour la lame dans ta gorge, de retour le sang qui fleurit contre la mâchoire de Димитрий, de retour tes doigts tremblants sur le manche de ton fusil de l'autre bout de ta baïonnette et tu as la peur à la gorge qui s'y agrippe qui te la déchires et qui transperce ta trachée
Покидать (Vas-t'en)
sans quoi tu finiras par le tuer à nouveau, sans quoi la mort reviendra s'infilter ici, sans quoi tu ne sauras jamais arrêter ton être maudit ni être capable de ne pas répéter tes péchés - tu as la voix brisée les larmes qui coulent toujours et l'écarlate sur tes doigts comme il y est toujours caché il ne reste plus rien de toi plus rien de rien que Dieu lui-même vienne te foudroyer qu'il vienne te calciner tu n'en peux plus tu dois mourir même si tu n'as pas le droit
Sam 27 Avr 2019 - 16:17
Les placards sont vides, mais la triste réalité est masquée par un désordre apparent qui trahit une hâte peu soigneuse de fouiller les entrailles du garde-manger sans prendre la peine de restaurer l'ordre dérangé. Ce chaos inspire un sentiment de familiarité chez Dimitri. Les placards sont vidés sans la moindre minutie, leur maigre contenu presque jeté au sol, sans la moindre rage non plus. Le vacarme couvre celui de la bouteille fracassée par son frère dans la pièce d'à côté. Ne pas trouver de thé l'énerve, mais pas autant que de se confronter à une loque à la place de son frère : il referme presque avec douceur les portes des placards, par comparaison avec la brusquerie avec laquelle il les a forcés.

« Mais t'as vraiment rien chez toi ! peste Dimitri en revenant dans le salon. Putain, tu peux pas t'engager une bonne pour faire les courses... »

Il s'arrête brusquement. Est-ce l'éclat lumineux du verre fracassé ou la hargne dangereuse qui couvre dans la voix de son frère ? Il lui faut quelques secondes pour assimiler ce qui se passe - le temps pour son cerveau torturé de savoir s'il doit rire ou pleurer. L'adrénaline éveille en lui un bref sentiment de satisfaction, comme si ce qui devait arriver était enfin venu, et qu'il allait avoir l'heure de gloire qui lui avait été longtemps refusée.
Mais quelle vision triste. Ilya a le regard rouge et les mains émues. Il s'accroche à son arme de fortune comme si sa vie en dépendant. Sa vie, ou celle de son frère, qu'il menace à tout instant d'effacer dans un accès de folie. Dimitri ne saurait dire qui doit être la victime désignée. Mais il est sûr qu'Ilya en est déjà une. Il ne ressent plus la moindre dignité en lui, juste cette allure de forcené qui a déjà tout perdu.
Cette vision catastrophique élime l'aîné des derniers lambeaux de son humanité.
Chien ou humain asservi, quelle différence cela fait.

« Tout doux, vieux, tente prudemment Dimitri. Je m'excuse pour tes placards, mais je tiens quand même à te dire que c'est toi qui y avais foutu le bordel à la base. Ça te donne juste une excuse pour ranger. Pour le reste, je m'excuse pas. J'sais que t'es capable de me zigouiller par honneur, mais de l'honneur, t'en as plus, tu vas juste t'effondrer comme une mauviette sur ce tapis d'ici deux minutes, alors fais-nous gagner du temps et laisse tomber ce tesson immédiatement. »

Son regard vif et brûlant semble dire tu sais bien que j'ai raison. Il n'attend que le moment où sa prophétie deviendra vraie - et où il n'aura plus besoin qu'Ilya lui donne son approbation.


hrp:
Mar 25 Juin 2019 - 7:56
qu'as-tu caché dans les plis de ta peau que du sang qui ne t'appartient pas
pas que tu l'aies volé, mais il s'est infiltré alors que tu as égorgé ton cadet d'un geste de trop - dans toutes les pores de ta peau pour encrasser à jamais ton être misérable et le tacher de son ichor mortel. son sang sur tes doigts ses derniers mots gargouillant dans sa gorge et la mort au fond des pupilles son dernier souffle étranglé son corps inerte dans tes bras ses os craqués jusqu'à ce qu'il ne soit réduit qu'en poussière au fond de ta paume les cendres du petit frère que tu aurais dû soulever jusqu'au soleil celui-là qui est mort, il est mort
tu l'as perdu tu as vu la vie quitter son visage tu as transpercé sa gorge toi-même de ta lame de tes ongles de ta chair de tes muscles qui a-t-il que tu n'as utilisé pour l'assassiner? il ne reste plus rien de toi que les armes que tu as portées comme pour un salut que tu ne mériterais jamais puisque tu as toujours eu ton destin de meurtrier dans la colonne sans même t'en rendre compte, les chaînes à tes poignets, le sang dans ta bouche, dans tes poumons, dans toutes les crevasses de tes os dans tous les plis de ta peau engorgé dans toutes tes entrailles au bout de tes doigts dans le fond de tes paumes comme avec le verre qui te transperce
Димитрий Димитрий Димитрий Димитрий Димитрий Димитрий Димитрий aux joues creusées aux yeux cernés aux pupilles éteintes Димитрий Димитрий Димитрий Димитрий  avec la mort dans ses entrailles avec le sang sur sa mâchoire Димитрий le fantôme Димитрий le cadavre Димитрий la coquille Димитрий aux membres détachés Димитрий aux poumons noyés Димитрий en silence Димитрий sourd aveugle muet Димитрий échoué Димитрий aux conséquences écorchées sur sa pomme d'adam Димитрий qui a payé le prix de tes péchés Димитрий mort assassiné pourfendu meurtrié massacré trucidé condamné

Димитрий avec son absence comme une lame dentelée dans tes poumons comme toutes tes côtes brisées la souffrance arrachée contre toutes tes entrailles comme toute ta peau écorchée
comme tu n'avais jamais réalisé avant cet instant même que - la destruction de son âme à part, son manque laisse un trou béant dans ta poitrine
ton regard acharné s'arrache au verre tranchant tes paumes jusqu'à la voix qui finalement perce ton crâne jusqu'à ce qu'il te reste de conscience.
tu relâches le tesson plus machinalement que volontairement alors que tes pupilles parcourent chaque trait de Димитрий, Димитрий que tu as vu mourir et qui pourtant est ici. tu l'as tué tu l'as exterminé et pourtant il est ici comme une tour au delà de toi avec son regard vif et brûlant sans pouvoir allumer un feu dans tes entrailles qui n'y aie pas déjà tout dévoré
et pourtant Димитрий
celui-ci n'est pas le tiens
le tiens est mort sous ta lame.
alors qui est-il?
un fantôme? un revenant aux chaînes cliquetantes attachées au fond des enfers?
un démon venu pour te faire payer tes péchés?
es-tu en enfer? es-tu finalement tombé pour venir tacher le royaume de Dieu de ton impureté? paies-tu finalement le prix de tout ce que tu as brisé jusqu'à être méconnaissable?
le sang s'écoule des blessures le long de tes mains sans que tu ne saches le reconnaître, les larmes tachent toujours ton visage sans que tu ne puisses en goûter le sel. il n'y a que le goût du fer dans ta gorge comme une lame. comme une baïonnette.
tu déplies lentement tes membres pour te lever sans jamais redresser ta colonne, et tu trébuche jusqu'à Димитрий pour lever tes mains à son visage à vouloir poser tes doigts sur chacune de ses joues et y laisser ta marque écarlate.
Ты прав. (Tu as raison.)
il a parlé d'honneur, mais tu as tout perdu. il ne reste plus rien que ton squelette grinçant et tout le sang qui court dans ses fissures
У меня ничего не осталось. (Il ne me reste plus rien.)
puisque tu as perdu ton frère et ta vie, que tu brûles désormais aux tréfonds de la terre pour les crimes que tu as commis et la mort que tu as volée;
Димитрий, le tuerais-tu une deuxième fois si tu en avais l'occasion? ton frère ton amour ton trésor que tu aurais tant dû protéger plutôt que pourfendre
Димитрий dont l'ombre se tient là devant toi sous tes doigts
Jeu 4 Juil 2019 - 12:13

Il tremble, Dimitri.


Il tremble d'appréhension, de peur, d'attente, d'excitation, de joie mal contenue, de joie malsaine, hilarante, dangereuse, perdue. Il sait bien qu'il ne se trompe pas, qu'il a parfaitement saisi de quoi est fait Ilya, que l'issue est jouée d'avance et qu'il ne risque rien. Mais il y a toujours ce doute, léger mais lancinant, cette infime possibilité d'erreur qui l'aurait réduit en charpie si elle avait été avérée, ce risque, encore et toujours, que l'on prend lorsqu'on prétend comprendre les personnes brisées. Dimitri aurait pu se tromper ; Ilya aurait pu mettre ses menaces à exécution, dépourvu de cette ancienne droiture qui aurait guidé avec précision chacun de ses gestes destructeurs, mais avec cette hargne instable qui l'aurait écrasé ses poings brutaux.


Mais le tesson reste immobile dans la main d'Ilya. Le reste de son corps s'anime avec la maladresse d'un cadavre. Chaque membre, courbé par une lourdeur dont Dimitri ne peut que deviner l'origine, se tend vers le cadet, comme s'il était la source de toute absolution. Un instant, pourtant, c'est le sang qui recouvre les restes de son frère qui se dresse devant Dimitri. Le jeune homme croit assister au retour morbide de celui qu'il a lui-même tué. Mais la vision s'efface, elle n'a pas duré. Son imagination pourtant fertile ne saurait tenir plus de quelques secondes l'image d'un zombie qu'il n'a jamais eu sous les yeux. Et c'est le vieux frère qu'il n'a jamais frappé qui rend les armes devant lui.


Quelle scène pathétique. Ilya se retient d'entrer en contact avec lui. La défaite règne sur son corps comme sur ses mots. Et que lui reste-t-il, en effet, si ce n'est cette carcasse inutile dont il ne s'est jamais débarrassé ? Un appartement en désordre, un cadet irascible, un métier peut-être, mais ce n'est pas ça qui fait une vie.


En cet instant éphémère, Dimitri ressent toute la puissance qu'il détient sur son frère. Taché depuis la naissance, il a mieux survécu à l'infamie : elle n'est qu'une de ces petites marques délétères qui assombrissent son âme déjà asphyxiée. Il n'a pas besoin de lumière pour vivre, il se complaît dans ces demi-ténèbres où il s'est toujours tenu. En cet instant, c'est lui qui possède le dessus. Il a le pouvoir de les pardonner tous les deux pour ce qu'ils ont fait, et de leur donner une nouvelle vie. Au fond de lui, c'est ce qu'il désire vraiment. Ou bien il peut profiter de la situation pour prendre sa revanche sur son frère, au risque de se nuire définitivement. Une telle décision ne devrait pas être une affaire de secondes, et pourtant, c'est un choix que Dimitri doit faire le plus rapidement possible.


Mais comment, puisque cela lui paraît impossible ?


Il soupire, subitement épuisé.


« Je t'aime, tu sais ? Je te le dis jamais, mais c'est vrai. Même lorsque je te déteste de toutes mes forces, je t'aime quand même. Alors dis pas qu'il te reste rien, d'accord ? T'as encore moi à protéger. »


Un peu de sincérité de temps à autres ne fait jamais de mal, et Dimitri se rend bien compte qu'il dit la vérité. S'il a tant de force pour détester du plus profond de son être son aîné, c'est parce qu'au fond de lui, réside une étincelle d'amour qui a toujours refuser de céder. Des relents d'enfance joyeuse où l'admiration puérile ne s'est pas encore gâtée. Sinon, pour chercherait-il, encore et toujours, à revenir vers lui, à obtenir son pardon, à trouver dans ses yeux l'approbation dont le manque s'est toujours fait sentir ?



hrp:
Ven 4 Mar 2022 - 22:45
The world is scarlet and glass and pain. He is untouchable, an ethereal vision, a ghost that you cannot set your bloody fingers upon. Should you try, surely death would take you too. The dead shouldn't mingle with the living. So why is he here? Perhaps you're finally dead, perhaps your spilled blood even now warps and swells the floor of your apartment, and God possesses oceans of mercy you simply do not have the strength to reject anymore. Димитрий, Димитрий, there is a black hole in your chest for his absence, could you really be so fortunate as to get to see him again? The alcohol still stings in the cuts on your hands and burns in your trachea, your head swimming. If Димитрий is here, it must be Heaven. You must be suffering as those unfit for God's Kingdom - still, you would relish any agony should it mean that you get to see him again.
How you've missed him. With crimson blossoming at his jaw, you would have given anything for just one more minute with him. Я тебя люблю, he says, so easily. It rolls on his tongue as though the words were so familiar and ordinary, and despite yourself something heals in you to hear it. Is that what was drowned in his last gurgle? The words are scalding hot against the roof of your mouth, begging to be let out. Suddenly you are so tired, tired of containing the raging ocean of feelings that batters your wretched frame, tired of holding up the tattered pieces of an ideal your shoulders were never wide enough to fill. It all seems so pointless now. He loves you. He loves you. You failed him, over and over, you are nothing before him but a pile of rubble, unrecognizable ruins of the tower you so relentlessly tried to build, and still - he loves you. Even dead with your blade in his throat, even with your blood on his hands, even after you failed to stop him from tainting his soul for eternity with your festering ichor, he loves you. Of course, that doesn't absolve you of sin. Of course, you should suffer until your last breath to pay for it. But he loves you. Isn't that enough?
You're already dead. What does it matter if you touch him? There's nothing left behind for you but him. With incredible gentleness you did not believe yourself capable of, you set your bloodied fingers on his skin, cupping his face tenderly, the most precious thing in the world. Softly you set your brow to his, your shoulders quaking with sobs, your cheeks and jaw dripping with tears.
Я тебя люблю (I love you)
Everything is broken already, what does it matter if you cling to the last pieces of yourself? Let go of all of that, it doesn't matter anymore. Abandon the last debris in the wreckage of the man you should have been, he died long ago. It was foolish to try to hold onto him.
Я тебя люблю, again, because it feels so holy when it's about him. This is what you've been depriving yourself of all this time? In the face of such tender radiance, the entire trajectory of your life seems empty and meaningless.
Никогда больше не извиняйся передо мной. Я уже простил тебя за все. (Never apologize to me again. I've already forgiven you for everything.) It feels like he's gonna slip away, like any minute the ecstasy of his affection for you will be ripped from you and you'll be dragged back down to Hell where you belong, so he has to know. All of the words you kept hidden inside your chest, you buried ferociously because you viewed them as a weakness. Now you have nothing left to lose, so what does it matter if you're weak? Я всегда любил тебя больше, чем свою собственную душу, и я должен был сделать с тобой гораздо больше. (I've always loved you more than my own soul, and I should have done so much better by you.) Your pride and your core in tatters, you unravel into him with no thought of keeping yourself together.
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