Zadig D'Ambroise
Caractère
Histoire
Château d'Ambroise, sous la lune calme, dans la profondeur de la région de Vannes secouée d'un soleil de Juin. 1914 résonne aux échos, les embruns d'une terre lointaine secouée de conflits politiques. Ça n'a pas lieu d'être dans le petit monde du garçon de drapés. Debout, immense face au miroir, une toge dérisoire en guise de simple costume qui pend doucement près de ses côtes décharnées, il invoque les esprits des plumes d'autrefois. Les grands maîtres de mots, ces dieux à échelle humaine aux destins gisant entre leurs mains aux mille miracles. Les fictions Antiques, Zadig les absorbe comme autant de vies que de cadeaux. « Nous savons que les cœurs les plus farouches ont été vaincus par l'amour. » récite-t-il, déjà ailleurs. Il est reine. Il est amante. Il est Phèdre. Devant lui, le regard circonspect d’Émile, adossé à l'un des murs de sa chambre, qui pour l'après-midi durant se doit de ne pas broncher et de donner la réplique. Mais sa patience a tout de même quelques limites. « Zadig, nous devrions vraiment nous préparer plutôt que de jouer à ça... » Encore. L'imminence du bal, rencontrer encore et toujours le gratin mondain des retraités parisiens, ceux qui fuient la hardiesse de la Capitale pour des lieux plus verts. Émile est loin des conventions des amoureux de Sénèque, il n'est là que pour faire plaisir à son ami d'enfance qui préfère mille fois déclamer ses tirades que de redescendre sur Terre. Un regard sévère lui intime de continuer, et c'est dans un soupire appuyé que La Nourrice entre en scène. « Il fuira. », le ton d’Émile est faux, décalé, mais tout cela pousse au sourire Zadig qui, dans un élan tragique, continue. « S'il fuit, je le suivrai, même à travers les mers. » Son regard capte son reflet. « Souvenez-vous de votre père. » La réplique fuse. Ici, point de Minos. Mais Théodore aux médailles, illustre vétéran. Théodore l'infirme, moignon de guerre, qui souhaite que ses fils empruntent la même voix. Théodore l'illustre fou au regard glacé, noir de terreur, vert de peur. « Je... me souviens aussi de ma mère. » Zadig tremble, sous l'impulsion de la réalité qui efface son monde parfait. Le monde aux vies tâchées de miracles éclatants, aux vies qui continuent derrière leur fin cachée. La mort n'est rien d'autre qu'un tombé de rideau. Un nouvel acte I et tout recommence.
Mais ce qu'on lui impose est au-delà de sa perception dramaturgique. Ainsi sa propre mère est-elle décédée depuis deux semaines des suites d'une mauvaise chute à cheval. Ainsi trouve-t-il en la personne de Pasiphaé, mère de la reine incarnée, un soupçon de réconfort. Comme toujours, ce sont ses mythes qui le guident. « Zadig ? Tout va bien ? »
Emile s'inquiète de son silence, de l'expression de tristesse qui luit dans les yeux verts. C'est un sourire que l'intéressé offre pourtant à son autre. « … Tu as raison. Allons nous préparer, nous continuerons plus tard ! »
La toge glisse, dévoile les affres nus de l'homme en liberté, celui qui, en secret, s'adonne à d'autres choix que ceux des bien pensants. Sourire rendu, Emile offre un pas, et ce sont deux bras puissants qui entourent la taille fine. « Tu ne cesseras jamais, n'est-ce pas ? Pourquoi tu ne pars pas avec moi ? Paris s'éveille seulement pour des talents tels que le tien. » Un baiser au creux des cheveux de feu. Des rouges qui s'empourprent tout autant. Il sait trouver les mots. Et Zadig sait les lui rendre. Se lovant dans la peau de Phèdre ainsi que dans les bras de son amant déguisé. « Ainsi te suivrais-je à mon tour, mon bel Hippolyte... » Un rire, un temps, le leur, sous les éclats de lumière.
Si Août n'avait pas frappé si fort, sans doute seraient-ils tout deux morts sur scène.
« Je ne voulais pas.
Je ne voulais pas y aller.
Ce n'est pas ce dont j'ai rêvé, ni lui, ni moi, ni personne.
Je ne sers à rien dans cette poignée de destins brisés. Je n'ai pas les épaules pour porter une arme. Personne, ici, n'est un tueur né.
[…]
On m'a dit que je soignerai les blessés. J'apporte les bandes et les compresses, je nettoie les tissus abîmés tandis que d'autres les répare. Mes yeux supportent le spectacles des jambes arrachées, des plaies tuméfiées de boue rampante. Mes oreilles saignent face aux cris. Mon cœur s'échappe au bord de mes lèvres abîmées.
Je veux rentrer.
[…]
Je ne sais pas combien de jours il nous reste. Le campement peut exploser à tout moment. La terre vrombit sous les pas des soldats.
J'ai peur de tout.
La nuit ne me sert plus au repos.
Elle sert mes angoisses comme la plus loyale des fidèles.
Il est parti, hier, au front avant pour tendre une embuscade à nos ennemis.
Lui, et quelques autres Justes.
Ils portent leurs espoirs à bout de bras. J'y crois. Le sourire d'Emile réconforte la moindre de mes peines.
Il pourrait vaincre une armée entière à lui tout seul.
[…]
Je meurs de froid sans nouvelles.
[…]
Est-ce qu’il me lira encore d'autres livres à son retour ?
[…]
J'ai sympathisé avec un alité. Il voudrait venir me voir jouer quand la Guerre sera finie. Je lui ai promis.
[…]
Si les conflits ne sont pas trop forts durant les journées à venir, je me suis juré de faire un spectacle pour toute la troupe de soldats présents.
Il faudra qu’Émile m'aide pour les costumes.
[…]
Je -
[…]
Emile est mort.
[…]
Emile est mort.
[…]
On n'a ramené que son casque.
[…]
Gaz moutarde... ?
[…]
Cette chose est grotesque et laide.
Je ne-
[…]
France. Je te tuerai.
[…]
Je crois même que je pourrai te fuir. »
« Juste là. Un peu de blush... tiens. Regarde-toi ! »
Le temps a fait son office. Déglingué, en morceaux éparses jusqu'à ne former plus qu'un tout sous la forme d'une cité inconnue. Hors de tout. De tout ses maux, vers d'autres mots. Longtemps, Zadig crût que Pallatine n'était que ce paradis tant recherché une fois les dépouilles privées de leur voyage terrestre. Mais n'y trouvant ni Émile, ni un quelconque Dieu auquel se rattacher, il dût se résoudre à s'oublier, et à recommencer. Longtemps, longtemps, il erra vers d'autres rives, pour comprendre. Et on lui donna des réponses aux questions les plus dures.
Ici, les rêves s'impriment en couleurs, face à de drôle d'objets et du métal aiguisé. Les magasins sont grands, vastes, comme d'immenses décors. Ici, le manoir est loin, sa famille aussi, ses camarades d'entre deux tranchées reposent ailleurs tandis qu'il fait d'autres rencontres au coin des ruelles. Ici, les groupes sont formés, s'opposent, mais l'un d'eux a fait d'une diva une opportuniste de choix, révélant de somptueux aspects sous les traits d'une culture éparse.
Ici, on connaît ses classiques, on en suit d'autres, d'autres proses composées, d'autres morceaux d'Art vertueux qui ravive toute la Beauté des jours passées.
Ici, son théâtre, il prend toute sa réalité. Il est grand, L'Ombre Rouge. Il a déjà vu de beaux titres, d'autres tours, toute une faune éclectique. Et il n'en a pas terminé.
Zadig, son maître fondateur depuis six petites années, joue à nouveau. Alan se prête souvent à ce genre de fantaisie. « N'es-tu pas adorable ? Tu devrais toujours porter ce genre de tenue ! Je vais te l'imposer en guise d'uniforme... », minaude le directeur à son disciple de cœur.
Le plus jeune fixe son reflet. A les voir ainsi, on dirait deux frères, ou deux sœurs, on ne sait pas vraiment. Mais ça les fait rire autant que faire se peut dans ce monde de paillettes. Alan, petit être des coulisses ayant fait suite à son père, main débrouillarde derrière la magie des décors. C'est lui, le grand miracle des secrets de magicien. Il ressemble tant au petit frère laissé au-delà de leur réel... Peut-être est-ce ainsi qu'est né ce véritable coup de foudre, au bord de l'amitié, pas tout à fait amoureux. Mais terriblement nécessaire. « … Oh, wow. », fait-il, bougeant les bras dans les tissus de la robe très dix-neuvième siècle. Alan se voit grimé en femme, et ça lui décoche un léger sourire, bien qu'il semble encombré par le drapé. « Euh, ouais. C'est pas pratique d'être une nana, j'ai compris... »
Un rire s'élève. Il n'y a qu'aux côtés du jeune garçon présent depuis quatre ans que ses sourires semblent aussi réels. « Et encore... je t'épargne les talons aiguilles... tu n'es pas prête pour ça. », lance-t-il, ne pouvant s'empêcher de toucher la tignasse de son cadet. « Dis-moi, Alan... on ne t'a jamais dit que tu ferais une magnifique Phèdre bouclée ? » Véhémente réponse dans un froncement de sourcils. « J'suis dans les coulisses moi, pas sur le devant d'la scène. Tu peux toujours rêver. »
Leurs regards se croisent, fardés, dans le reflet. Encore un jour à faire vivre l'imaginaire collectif, ensemble. L'âme du théâtre et de son équipe entière, rien ne surpasse la cohésion des Hommes au service du public. « C'est exactement ce que nous faisons en ces lieux, mon garçon... Nous rêvons. »
Alors, Madame Guillotine sourit. Car elle sait que durant des milliers de soirs, à l'abri du temps, les trois coups retentiront quoiqu'il arrive.
Yo-ho les choubidous. Moi c'est Aurore (ou plus communément Syato sur les interneeeets), 22 petites années au compteur et c'est un plaisir de vous rejoindre. o/ Avec Alan on cherchait un forum qui sortait de l'ordinaire avec un contexte en béton pour nous changer les idées, et j'dois dire que ça a été un coup de foudre TOTAL pour Chronosrep. ** Donc of course, c'est mon premier compte !
Dans la vie j'suis guide et je vais tenir une expo pendant l'été, j'aime les jeux vidéos, le dessin et glander des plombes sur YT, et et et je prévois de reprendre la BD en amateur.
Sinon, que dire d'autre... ? ._. Ben... J'VOUS AIME DEJA LES GENS. ♥