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'cause when you worry your face will frown and that will bring everybody down — cameron.

Dim 21 Aoû 2016 - 17:19
Un virage, un autre virage.
Tu glisses sur la rampe, coules entre deux ruisseaux de vent, ondules de droite à gauche, de gauche à droite, tentant d'user les mots de Seiko sous les roues de ta planche jusqu'à ce qu'il n'en reste qu'une tache d'oubli sur les tôles. Ce qu'elle peut faire à présent, tu t'en contrefiches – qu'elle rentre chez elle, lui as-tu crié, qu'elle retrouve les couloirs exigus de son monde indolore, qu'elle te lâche et te laisse tranquille, toi qui ne lui as rien demandé, ni compagnie ni soutien, et certainement pas d'être aimé.
Un virage, encore. Les courants d'air imitent sa chevelure quand elle noircit la brise, ils courent sur tes joues pour les rafraîchir tandis que dans ton dos, sur la plateforme de départ, tes congénères se remettent à piailler. Au gré de tes vagues tu arraches des bribes à leur conversation, recomposes malgré toi des phrases que tu aurais préféré ne pas entendre, devines des exclamations – d'encouragement ou de jalousie, tu ne saurais dire. Le spectacle que tu te refuses à voir semble les exciter au plus haut point, eux qui n'ont pas compris pourquoi tu joues les mauvais perdants, et leurs éclats de voix finissent involontairement par attiser ta curiosité ; tu remontes donc au poste d'observation, jetant ton regard où ils portent leur attention. Et de là-haut, ce que tu découvres te pétrifie.
L'enfoiré. Profitant de ce que tu avais sonné la retraite, ton aîné s'était empressé d'avancer ses pions sur le territoire isolé. Il n'y avait pourtant nulle conquête à honorer de ton point de vue, aucune nation dont tu aurais dû t'emparer, mais lui l'avait imaginé autrement et, en l'absence de son unique rival, il franchissait maintenant le Rubicon avec l'assurance de la victoire. Ils étaient loin, elle et lui, lui et elle, cependant tu n'eus besoin ni d'une longue-vue ni d'un dictionnaire pour interpréter ce qui se déroulait là-bas, à l'endroit même où vous vous étiez tenus l'instant précédent, elle et toi, toi et elle, et le malaise qui germa dans tes entrailles. Leur corps trop proche l'un de l'autre, beaucoup trop proche, sa silhouette enfantine qui disparaît dans l'ombre de ton comparse, comme absorbée par la force qu'il lui impose, et les zouaves à côté qui parient sur son entreprise :
« Un Mars qu'il se la fait.
Tenu. »
Tu te mords la lèvre pour t'empêcher d'en frapper un.
« Et toi, Cam ? Qu'est-ce tu mets... Cam ? »
Tu as déjà sauté sur le talus et cavales à en perdre haleine.  

Dans la précipitation, pour aller au plus rapide, tu n'as pas pris ta planche – seules tes jambes t'emportent, chemin inverse à celui que tu parcourais naguère, elles t'entraînent aussi vite qu'elles le peuvent auprès de l'hirondelle que tu as délaissée, l'alouette capturée par un mauvais oiseleur. Tu ignores pourquoi, à les voir ainsi, c'est une image d'elle et son père qui se dessine sous tes paupières ; tu l'ignores mais cela rajoute à ton ardeur, allonge tes foulées. Pourvu que tu n'arrives pas trop tard, songes-tu, quelle bêtise de l'avoir abandonnée ainsi, esseulée en pleine nature, alors qu'elle ne connaît rien au dehors, alors qu'elle est si naïve face à l'inconnu. Pour ton camarade, ce n'est sans doute qu'un jeu, une plaisanterie fugace. Un coup de dés. Pour elle, c'est toute une aventure. Et tu t'en voudrais si elle terminait mal. Tu avais pris cette responsabilité, Cam, même si personne ne te l'avait exigée ; tu l'avais supportée parce que, derrière ta rogne apparente, tu te devais de la protéger.
Loin de ralentir à leur approche, tu lances un « Écarte-toi d'elle ! » à celui qui fut ton compagnon pas plus tard que la veille et qui, à ce moment, endosse le voile de ton ennemi – ordre qu'il ne suit qu'à moitié, se contentant de relever la tête, un rictus en travers du visage. Sans vergogne, il te nargue, inconscient du fait que tu ne t'arrêteras pas.
« T'as changé d'avis, finalement ? »
Très drôle. T'es mort de rire. T'es tellement hilare que tu viens lui percuter les côtes de plein fouet, épaule en bélier, impavide. Il te met une tête de plus, toutefois tu as l'élan nécessaire pour lui saper l'équilibre et, dans un entremêlement de membres et de tissus, vous chutez au sol. Ton avant-bras ripe sur le béton, s'éraflant sur toute la longueur sans que tu n'y prêtes gare ; en un éclair, tu t'es hissé sur ton aîné et lui agrippes le col, près de lui envoyer ton front dans le nez. Aussitôt il proteste, ahuri :
« Bordel mais qu'est-ce qui t'prend ? »
C'est vrai, ça, qu'est-ce qui te prend ? Qu'est-ce qui te prend les tripes comme ça ? Qu'est-ce qui te serre les crocs de cette façon ? Tu ne sais pas. Tu ne sais rien d'autre que :
« Tu la touches encore une fois et j't'en colle une. »
Lun 22 Aoû 2016 - 23:42
c'est une suffocation - il comprime l'air contre tes lèvres qui ne circule plus et tu gobes gobes gobes comme tu peux sans recracher les yeux qui s'embuent de larmes ((asphyxie)) inquiétante que tu ne peux repousser - tu comprends à peu près ce qu'il se passe et si ton cœur ne tambourine pas follement sous la crainte ((car tu crains rien ni personne)) tu cales tout de même des interjections et des protestations contre les lippes de ton assaillant ; trop grand trop fort peut-être trop homme tout simplement pour ta carrure chétive et bien moins imposante.
tes oreilles sifflent - ou alors est-ce les oiseaux du park ? et pourquoi pas les quelques adolescents croisés tout à l'heure ? bam bam bam tu penses entendre ton coeur mais il n'en est rien - est-ce le sien ? non sûrement pas ça tape sur le sol à un rythme effréné plus violent encore qu'une salsa endiablée ; ça s'échoue en écho contre les parois des ruelles et une voix qui résonne
relance les battements de ton muscle cardiaque
alors que tu reprends désespérément ton souffle quand l'aîné relève le faciès ailleurs ; tu tousses légèrement, floue et équivoque le temps de redescendre cinq secondes sur terre et de jeter la vague de ((dégoût)) qui violente tes entrailles ; pour lui, pour toi-même ((mais pas le temps)) d'atterrir de poser tes pieds en douceur non que la silhouette engluée à toi se fait arracher en vitesse ((pour ton plus grand plaisir)) et tu regardes, interdite, les deux garçons par terre tu ne peux cesser de fixer
les mèches enflammées qui dépassent du bonnet
ayant du mal à croire ce qui se présente à toi
tes lèvres s'entrechoquent bêtement dans le silence alors que ses menaces résonnent dans l'air. tu tangues un peu sur tes pieds incertains, déconcertée par la situation ((tes blessures te lancent - peut-être as-tu réouvert une ou deux plaies dans ton imprudence)) mais tu t'approches des silhouettes face à toi, posant délicatement ta main sur l'épaule de l'estonien cameron ta voix est douce, velours dans toute cette violence, ton ton est calme, posé et rassurant ne fais pas ça s'il-te-plaît, je ne veux pas te voir te battre. je vais bien. laisse-le partir. ça serait plus convaincant si tes yeux brillaient moins, s'il n'y avait pas une perle qui se perdait sur ta joue - le soulagement, sûrement - ça serait plus convaincant si tes lèvres ne luisaient pas tant, encore humide. et tu ne souris pas, inquiète, alors que dans tes yeux se confondent un certain malaise confronté à l'appréhension de ce qu'il va faire ; tu n'oses pas dire plus - tu retires même ta main ((tu penses n'avoir peur de rien)) pourtant cette boule au fond de te ventre te dit que peut-être peut-être oui tu as peur de vivre encore
((son rejet))
qui lui va si bien




© YAM
(( seiko & cameron ))
don't worry
be happy
506 mots.

Mar 23 Aoû 2016 - 22:25
Tu ne saurais justifier ta soudaine brutalité, expliquer pourquoi tout à coup tes poings crèvent de s'enfoncer dans la mâchoire de ton camarade, pourquoi Emmet – puisqu'il faut bien le nommer au risque de tomber à court de synonymes pour ce faire – ne t'inspire plus à cet instant qu'une brusque antipathie quand tu avais naguère à son égard cette admiration malhabile, teintée de jalousie, qui est d'ordinaire l'apanage des petits frères envers leurs aînés. Il ne faudrait cependant creuser loin pour en découvrir la raison, la substitution qui s'est produite à l'intérieur de ton crâne, le transfert à l'origine de ta colère. En imposant sa volonté à Seiko, en lui infligeant cette emprise sur son corps, il s'est comporté à l'instar de ce père dont tu ignores jusqu'aux traits les plus grossiers, mais qui symbolise pour ton esprit prompt aux émotions un tyran de la pire espèce. Tu n'as pourtant pas de sentiments pour elle, ou du moins, rien qu'une affection diffuse, anonyme, qui fluctue silencieusement à la surface de ta conscience – et c'est déjà beaucoup pour quelqu'un que tu connais si peu. Sauf que voilà, l'attitude d'Emmet coïncide avec cette atroce révélation, la princesse battue par le roi dans sa tour d'ivoire, et toi qui refusais d'être son chevalier, tu as accouru à sa rescousse sans attendre de recevoir un foulard sur ta lance. Et à cela s'ajoute, probablement, la frustration ressentie devant ton incapacité à tabasser le dit paternel ; tu as dû trouver une échappatoire à ta colère, offrir une alternative à ton amertume.
Puis un moineau vient se poser sur ton épaule. Au son, au toucher, tes phalanges se desserrent autour du tissu qu'elle étreignent, ton buste se redresse davantage au-dessus de ton adversaire, permettant à la tension de retomber d'un cran. Dans vos yeux qui se jaugent, il demeure néanmoins un fiel acide, une fêlure que seule la distance sera capable de combler.
« Tu l'as entendue, Cam ? Bouge. »
Ha. Et si tu n'as pas envie ? Une chance que tu ne sois pas aussi mesquin. De toute façon, il aurait été en mesure de renverser le rapport de force sans difficulté, et dans un combat à mains nues tu ne l'aurais sans doute pas emporté face à lui – tu finis par te relever, non par soumission à ces ordres qui éclosent de part et d'autre de ton être, mais parce que tu aperçois un adulte au bout de la promenade, alerté par le mouvement, qui se dirige vers vous. Ennuis en perspective – quelle idée d'attirer autant l'attention. Quant à Emmet, sitôt debout qu'il te bouscule, âpre, crachant un « Tocard » que tu encaisses comme une gifle, avant de s'éloigner.

Ta colère est encore trop vive pour s'incliner devant le dépit qui t'envahit. Il n'y a pas à baratiner : fille rime avec embrouille. Ça finit pareil, en plus – c'est là signe éloquent. Néanmoins, tu ne peux en vouloir à l'hirondelle d'avoir frôlé l'effeuillage. À la seconde où tu croises ses iris pivoine, tu relâches un mince soupir. Plus de peur que de mal. À l'exception de ce bras qui te brûle sur toute la longueur de l'éraflure et de ce genou qui a heurté l'asphalte au moment de la chute. Mais tout cela, étrangement, s'amuït jusqu'à disparaître, éclate sans un bruit lorsque tu remarques ce trait liquide sur sa joue, cette lueur nacrée sur sa bouche ; l'espace d'une pulsation, tu comprends pourquoi ton aîné a agi de la sorte. Cela ne l'excuse pas, certes, rien ne l'excuserait, toutefois tu saisis l'ampleur de sa tentation. Et puis tu oublies ce ruisseau salé, cette luisance humide – ces choses-là ne t'intéressent pas.
« T'aurais dû le repousser. Faut pas te laisser faire comme ça » déclares-tu enfin en guise de conclusion tout en te gardant de souligner l'allusion à d'autres circonstances, à des contextes beaucoup plus agressifs, différents d'un simple baiser, même forcé. Tu sais qu'il est toujours plus facile de paraître moralisateur après la bataille, quand on n'a pas vécu les événements, et que cela ne supprimera pas le souvenir de sa mémoire. Or, si cela pouvait ne serait-ce que servir d'exemple à ne pas réitérer, vous y gagneriez quelque chose. Elle de ne plus endurer toutes les intrusions extérieures, et toi de ne pas t'inquiéter dès que tu la sais isolée. Mu par les derniers relents d'anxiété, tu oses lui attraper la main – pas le poignet cette fois-ci, la paume entière, resserrant tes doigts contre les siens, plus froids, plus fins, tellement fluets. C'est doux et gênant à la fois, malgré ton faciès autoritaire.
« Évitons de nous éterniser ici. Je vais récupérer mon skate et on s'en va. »
Parce qu'il est hors de question que tu l'abandonnes – l'esprit chevaleresque d'accord, mais jamais sans sa monture.
Mar 1 Nov 2016 - 16:54
tu ne sais pas si ton intervention a été si bénéfique que ça - les mots sont rêches et accrochent l'asphalte mais au moins la violence est évitée. tu n'en es pas particulièrement friande même si tu sais que souvent elle ne peut être évitée - tu as beau le vouloir, tu as du mal à croire au pacifisme total, l'homme est conformé pour réagir à ses pulsions et les extérioriser physiquement quand il ne peut plus rien contenir à l'intérieur seulement certains ne contiennent ((rien)) et se contentent d'exploser à tout bout de champ - un peu comme l'altermondialiste, visiblement. tu regardes la silhouette repoussante s'éloigner, finis par passer le revers de ta main sur tes lèvres pour enlever la moisissure qu'il a laissée dessus ((sensation de pourri)) qui te ronge la peau là où il t'a touchée tu te sens un peu plus ((adulte)) et ça t'attriste, muettement, alors que la trace de larme s'efface du bout de ton pouce comme si elle n'avait jamais été là. tes yeux se font plus hésitants malgré leur assurance, ne sachant pas s'ils doivent - ou peuvent - rencontrer les siens ; s'il ne va pas repartir, encore. il repart si vite. c'est un nuage de fumée entre tes doigts et toi qui disparais tout le temps tu te rends compte désormais à quel point cela peut être déroutant pour autrui
mais ça ne t'empêchera pas de le refaire
tu le sais déjà
sa remarque se fait amère à tes oreilles et tu en ris intérieurement, ne trouvant toujours pas le juste dans son raisonnement. tu saisis très bien le sous-entendu et tu oses porter un regard sur lui, observant les dégâts du sol sur sa peau. tu t'attends à des réprimandes par milliers, des injures peut-être ou tout simplement être ignorée tandis qu'il reprend sa route en solitaire mais tu écarquilles légèrement les yeux quand il s'empare de tes doigts, de nouveau des éclats dans tes nébuleuses carmines alors que tu relèves la tête vers lui. et on s'en va. on - tu y vas aussi, il va rester un peu plus avec toi. ton visage fleurit, loin de toute la misère du monde abattue sur tes épaules et tu enserres gentiment tes doigts aux siens pour mieux les séparer quelques secondes, le temps d'arracher le bas de ta robe pour l'enrouler tout le long de son épiderme abîmée sur le bras, habile dans tes gestes - tu as l'habitude d'en faire, faut-il dire. tu recommences pour son genoux, le rafistolant en quelques coups de main rapides et délicats pour mieux reprendre sa main, satisfaite, t'en faisant peu pour les bords en piteux états de ta robe ((tu n'es guère le genre à t'en soucier)) l'impatience et la curiosité au bout des lèvres. je te suis. bien sûr que tu le suis, tu irais jusqu'au bout du monde si c'était pour lui. puis, plus douce tu murmures. merci d'être revenu, cameron. c'est tout ce que tu peux dire, après tout.




© YAM
(( seiko & cameron ))
don't worry
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532 mots.

Dim 6 Nov 2016 - 21:45
On s'en va. Tu ne sais pas où, tu ne sais pas comment, sauf que tu as décidé d'y aller et de l'emmener avec toi, un peu comme l'on emporte un chaton arraché à son carton, les promesses de cajoleries et le sentiment du samaritain accompli en moins – c'est-à-dire tout l'intérêt d'arracher au dit carton le dit chaton – mais tu t'en fous, tu as bien l'intention de quitter cette vaste zone de turbulences et vous trouver un coin tranquille où l'autre obsédé ne viendra pas chasser, pourquoi pas abandonner le skate-parc et retourner en ville d'ailleurs, t'amuser à mener l'alouette par le bout du nez dans des endroits qu'elle n'a jamais explorés – même si pour le coup une simple rue suffirait – et ensuite peut-être réfléchir aux événements ? Car si tu es doué pour tracer des plans sur la comète, il te manque encore la rigueur méthodique de l'astronaute, celle grâce à laquelle tu dessinerais votre itinéraire les yeux fermés sur la carte des constellations, celle qui te permettrait de la guider en toute nonchalance, certain de votre prochain alunissage. Pourtant, tandis que tu t'apprêtes à réactiver la mécanique de tes rotules en partance pour la ceinture des Perséides, tu sens qu'elle se détache, division cellulaire d'avec ton épiderme, qu'elle s'écarte, pas trop néanmoins, juste assez pour t'obliger à la regarder afin d'assouvir ta pulsion curieuse, et ce que tu observes te stupéfait.
Pour toi, elle déchire la corolle de son liseron, arrache aux pétales de son raflésia une large bande de tissu qu'elle enroule autour de tes blessures, sans te demander ni ton avis ni ton approbation – tu aurais refusé si elle avait posé la question et elle l'a déjà deviné. Le coton frotte contre la lésion, avive la douleur que l'indifférence aurait fini par dissiper, toutefois tu te retiens de grimacer, de la rejeter de nouveau après ce malencontreux incident et te contentes de relever la tête dans la direction opposée, semblable à un soldat détournant fièrement le regard de la plaie qu'une garde-malade s'évertue à lui nettoyer.
« C'est rien, t'sais, ça fait même pas mal. »
Oh, tu te doutes qu'elle le sait, qu'il n'y a dans ces gestes qu'un remerciement déguisé, ou du moins une tentative d'excuse silencieuse parce qu'il est possible qu'elle se sente coupable pour cela, et c'est pourquoi tu la laisses faire, tu la laisses être ton infirmière, juste un instant, si elle peut en être soulagée. Ne retournant vers elle que lorsqu'elle termine ses nœuds, la vision happée par la crête arrachée de ses jupes, par ce rivage en lambeaux qui dévoile davantage ses jambes – à cause de toi. À cause de toi quand elle t'offre sa gratitude ; sa logique t'échappe et te contrarie l'espace d'une seconde.
« Et t'as pas à m'remercier. C'est normal. » Ses phalanges entre les tiennes, si fragiles. Des tiges de verre blanc. « Faut qu't'apprennes à t'défendre, sinon ils en profit'ront. » Ils, oui, tous. Puisqu'il est évident que de tels actes se reproduiront, de plus en plus avec l'adolescence qui fleurit, au fur et à mesure que la maturité s'épanouit. C'est attendu, aussi sûrement que l'été suit le printemps. Et cela t'inquiète d'avance.

Cette discussion-là close, vous vous mettez en route jusqu'à approcher des rampes ; à l'abri d'une haie, tu lui demandes de t'attendre sans être vue le temps que tu ailles récupérer ton fidèle destrier puis te sépares d'elle sans guère piétiner ; rien qu'à entendre les voix qui fusent depuis le haut des plates-formes, tu en déduis qui est présent et quel genre de réflexions que tu pourrais recevoir si on te voyait en compagnie de l'hirondelle – le genre chiant, à éviter de n'importe quelle manière. Heureusement, il en est un qui n'est pas au courant de l'histoire, et c'est à lui que tu t'adresses depuis le sol :
« Hé, Mok, file-moi mon skate ! »
La tête souriante de Kshamenk dépasse par-dessus les barrières et sa chevelure décolorée bouffe le soleil au moment où il se tourne vers toi. D'un coup d'œil, il repère ta monture avant de la brandir en s'étonnant, et dans sa voix jaillit une nuance déçue.
« J'viens d'arriver et toi tu r'pars ?
Ouais, j'ai des trucs à faire. Une prochaine f... »
Le brusque rire d'Emmet t'interrompt – plus désagréable qu'une scie à métaux sur de l'acier en guise de réveil. Tu le fusilles en pensée dès que tu l'aperçois, sur la rampe opposée ; il approche deux doigts de sa bouche puis vient y faufiler sa langue tout en te narguant de sa gueule de serpent goguenard, ce à quoi tu répliques en frappant ton bras au sommet duquel se dresse ton majeur.
« Descends, que j'te défonce ! » t'écries-tu, certain qu'il ne répondra à ce défi qu'au moyen de railleries et d'insultes qui ne manqueront pas de te faire bouillir de rage. Cependant, Kshamenk distingue aussitôt cette spirale naissante, suffisamment perspicace pour s'interposer entre vos deux inconditionnels orgueils. Il décèle même plus que ce que tu ne saurais voir, par-delà ce que tu cherchais à camoufler derrière une rangée de verdure – à moins qu'il n'ait traduit tes bandages par une preuve décisive ? – et te jette ta planche avec un clin d'œil amusé.
« Vas-y vite, tu me raconteras ! »
Tu grimaces pour toute réponse puis te presses de déguerpir, t'efforçant de ne pas montrer ton impatience.

Tu ignores dans quel état tu la retrouveras. Ne se sera-t-elle pas faite alpaguer par un dégénéré, draguer par une bande de crocodiles ou dévorer par un prédateur mille fois plus sournois ? Est-ce qu'elle aura su refuser qu'on l'approche en ton absence ou bien sera-t-elle restée sans défense, innocent moineau, vulnérable mésange, prise dans les rets d'un oiseleur aux mains grasses ? Tu n'oses pas l'appeler, de crainte que tes compagnons t'entendent, pourtant ce serait mieux. Plus facile. Radical, même. Moins angoissant.
Allons bon. Où est-ce qu'elle est, déjà ?
Où est-ce que tu l'as encore oubliée ?

Tu ne te rappelles plus quand tu as commencé à te soucier d'elle au-delà du raisonnable.
Mer 26 Avr 2017 - 15:28
(('cause when you worry your face will frown and that will bring everybody down)) ft. cameron // 644

la douceur dans tes gestes sur les plaies ((l'habitude)) sûrement de les faire sur toi ((la culpabilité)) de le reproduire sur lui oh le sais-tu intrépide le sais-tu sans foi ni loi tout ça ne t'empêche en rien de sentir ton être se tordre un peu à la vision du rouge de tes yeux s'écouler de sa peau. coupable - c'est de ta faute. quand bien même ne sais-tu pas trop pourquoi tout cela est arrivé ((réfléchis donc)) ça n'empêche pas tes orbes de quémander une vaine miséricorde. c'est rien, ça fait même pas mal. tu relèves les yeux vers lui, un air un peu trop terre à terre pour lui qui est sûrement habitué à te voir en plein envol. c'est ce que je dis, aussi. après que ton père passe et laisse ta carcasse au sol. et tu sais qu'il comprendra très bien l'insinuation par lui-même. ça ne veut pas dire que c'est bon pour autant - c'est toi, qui l'a dit. alors qu'il laisse un peu sa fierté de côté, au moins devant toi. surtout devant toi ((mais c'est tout à ton égard qu'il la dresse plus haute que jamais seiko)) tel un indomptable protecteur, la féroce bête qui n'a jamais mal ni ne pleure ; sans faiblesse aucune, terrible et immortelle.
et tu as du mal
à comprendre pourquoi te protéger serait normal quand il n'y a rien à gagner en retour ((il ne tirera rien de toi après tout)) il n'est pas comme ton père ((tu n'es pas son héritière)) te forcer à te rebeller n'amènera rien de bon pourtant alors oui
tu as du mal
à te dire que d'autres pourraient recommencer ce genre d'immondices à ton égard - qu'y a t'il de si charmant à ce genre de choses pour les grands - chaleur, froideur, looping dans ton estomac ((la sensation des lèvres sur les tiennes et de)) tu fermes tes paupières quelques instants, chassant les sensations qui hérissent tes poils sur ta peau, serre un peu ses doigts entre les tiens. un dernier regard sur le mur contre lequel ton dos reposait quand il était là, plus grand, si fort, si terrible et qu'il
oui
partons.

vous marchez le temps de revenir chercher le... skate ((tu penses que c'est le mot)) tu n'en es pas tout à fait sur, de cameron. il te laisse et tu ne t'en pleins guère. pourtant, tes yeux parcourent les lieux, mémorisant involontairement les visages, les rires, les démarches ((impressionnée)) quelque part de toute cette nature, cette liberté qui brûle les ailes dans ton dos oh si belle si tentante et toxique oui terrible liberté et si c'était pour elle sûrement
serais-tu plus qu'heureuse de crever.
interpellée par la chevelure blonde et les traits fins de l'interlocuteur du roux, tu ne t'en détaches qu'au rire d'une voix familière et quand les mots fusent ((des mots que tu ne comprends pas)) trop pure encore pour mieux t'y retourner et à ta surprise ((tu es sure oui)) de capter le regard de l'aîné à qui tu accordes un léger sourire. l'altermondialiste revient vers toi au pas de course et tu en ris un peu, amusée de le voir si pressé en accourant jusqu'à ta maigre silhouette toujours cachée ; quand il arrive ((tu vas bien)) rien de mal ne t'est arrivé et tu joins tes mains dans ton dos, les yeux à nouveau brillants, de retour à ton éternel statut intouchable. tu l'invites à repartir, joviale et impatiente oui
de découvrir
ressentir
aimer
((pas de grandir))
juste peut-être
un tout petit peu oui
de vivre

((avant de retourner te faire arracher les ailes))




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